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Carnets d'une psychexploratrice autodidacte
23 mai 2020

C.G. Jung – La vie symbolique

 

hani-jamal

 

Voyez-vous, l’homme a besoin d’une vie symbolique. Il en a un besoin urgent. Nous ne vivons que des choses banales, habituelles, qu’elles soient rationnelles ou irrationnelles – ces dernières font d’ailleurs partie intégrante du champ rationnel, sans quoi nous ne pourrions les qualifier d’irrationnelles. Mais nous n’avons pas de vie symbolique. Quand vivons-nous symboliquement ? Jamais, sauf lorsque nous avons part au rituel de la vie. Mais qui parmi nous a véritablement part au rituel de la vie ? Fort peu de gens. (…)

Disposez-vous, quelque part dans votre maison, d’un coin où vous puissiez accomplir les rites, comme on peut en voir en Inde ? Là-bas, même dans les maisons les plus modestes il y a un soin séparé du reste par un rideau, où les occupants du logis peuvent mener leur vie symbolique, renouveler leurs vœux ou méditer. Nous n’avons rien de tel ; nous n’avons pas ce genre de coins. Bien sûr nous avons notre propre chambre, mais il y a un téléphone qui peut sonner à tout moment, et nous devons toujours être prêts à y répondre. Nous n’avons pas le temps, pas de lieu. Où pouvons-nous trouver chez nous ces images mystérieuses qui expriment les dogmes ? Nulle part ! Certes nous avons des musées, dans lesquels nous assassinons les dieux par milliers. Nous avons dépouillé les églises de leurs images mystérieuses, magiques, pour enfermer celles-ci dans des musées d’art. C’est du blasphème.

Ainsi nous n’avons pas de vie symbolique alors que nous en aurions tous le plus grand besoin. Seule la vie symbolique permet aux besoins de l’âme de s’exprimer – je veux parler des besoins quotidiens de l’âme ! Et comme les gens ne possèdent rien de tel, ils ne peuvent jamais s’échapper de cette galère, de cette vie épuisante, terrifiante de banalité, où ils ne sont « rien d’autre que… ». Dans le rituel ils sont proches de la divinité, ils sont même divins. Il suffit de penser au prêtre de l’Eglise catholique, qui est dans la divinité même : il se porte lui-même sur l’autel sacrificiel, il s’offre lui-même en sacrifice. Faisons-nous cela ? Quand sommes-nous conscients de faire cela ? Jamais ! Tout est banal, tout n’est « rien d’autre que… ». Voilà pourquoi les gens sont névrosés. Ils en ont tout simplement assez de tout cela, de la banalité de cette vie, et c’est pourquoi ils veulent du sensationnel. Ils veulent même une guerre, ils veulent tous une guerre. Ils se réjouissent à l’annonce d’une guerre, et disent : « Dieu soit loué ! Enfin il se passe quelque chose, quelque chose qui nous dépasse ! »

De telles choses nous touchent en profondeur et il n’y a rien d’étonnant, dans ces conditions, à ce que les gens deviennent névrosés. La vie est trop rationnelle, il n'y a pas d’existence symbolique dans le cadre de laquelle je puisse jouer un autre rôle, celui que je dois tenir en tant qu’acteur du drame divin de l’existence.

 

C.G. Jung – La vie symbolique, Psychologie et vie religieuse (Albin Michel)

 

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  • Bienvenue ! Je partage ici les textes des auteurs phares de la psychologie des profondeurs qui éclairent et accompagnent mon exploration intérieure, ainsi quelques parcelles de mon expérience personnelle. Bonne lecture, Carine - Phalae
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